En droit des obligations du droit français, la délégation, évoquée et sommairement décrite par l'article 1275 du code civil, est l'opération juridique qui se présente comme celle par laquelle un débiteur, appelé délégant, offre à son créancier, appelé délégataire, l'un de ses débiteurs, appelé délégué, qui consent à s'obliger personnellement envers le délégataire. On a observé que l'usage qui est fait de désigner ce mécanisme sous l'expression «délégation de créance» serait impropre, car suggérant l'idée d'un effet translatif, alors que c'est toujours une personne, un débiteur, qui est déléguée. Même si l'observation n'est pas inexacte, elle est sans portée dès lors qu'il est aujourd'hui admis tant en doctrine qu'en jurisprudence que la délégation ne réalise pas un transfert de créance ou de dette.
Les Conditions de la délégation sont au nombre de trois. Des obligations antérieures lient certaines parties, même lorsque la délégation ne réalise aucune novation(délégation imparfaite) ; le délégué souscrit personnellement un engagement nouveau et direct au profit du délégataire et le consentement des trois intervenants est nécessaire. En premier lieu, la délégation ne se comprend que s'il y a antérieurement des rapports juridiques entre le déléguant et le délégataire. En deuxième lieu, La délégation emporte nécessairement création d'un rapport de droit nouveau et direct entre le délégué et le délégataire. Cette exigence résulte de la lettre même de l'article 1275 du code civil, puisqu'il prévoit qu'un «débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier». Le délégué s'oblige ainsi personnellement envers le délégataire. La règle signifie qu'une nouvelle obligation est créée au profit exclusif du délégataire; le délégué n'est donc pas le mandataire du délégant. La règle est certaine en jurisprudence; elle est également admise en doctrine. Le délégué s'oblige également directement envers le délégataire. Ce n'est que le corollaire de la nécessité d'un engagement nouveau. Le droit positif retient ainsi que la créance déléguée et ses accessoires deviennent le gage spécial - le droit exclusif - du délégataire. Elle ne peut donc être saisie par les créanciers du délégant. En troisième lieu, le consentement des trois intervenants est nécessairem; l'acceptation du délégant, l'acceptation du délégataire et l'acceptation du délégué sont ndispensables.
La délégation est opposable aux tiers sans l'accomplissement d'aucune forme de publicité analogue à celles de l'article 1690 du code civil. Si la créance du délégant sur le délégué s'éteint, non pas du fait de l'acceptation par le délégataire de l'engagement du délégué à son égard, mais seulement par le fait de l'exécution de la délégation, ni le délégant ni ses créanciers ne peuvent, avant la défaillance du délégué envers le délégataire, exiger le paiement.
Les effets de la délégation se divisent entre le délégué et le délégataire, le déléguant et le délégataire et le déléguant et le délégué. S’agissant de l’effet entre le délégué et le délégataire, le délégué ne peut se soustraire à l'exécution de son obligation envers le délégataire en invoquant des causes touchant à la formation ou à l'exécution de l'une ou l'autre des dettes primitives ; elle est une conséquence du caractère nouveau de l'engagement du délégué envers le délégataire. En effet, puisque le délégué prend un engagement direct et nouveau, celui-ci ne puise pas sa force dans les obligations antérieures existantes entre les parties, même s'il a pour finalité leur extinction. La règle de l'inopposabilité des exceptions concerne les seuls moyens de défense qui se rattachent aux obligations antérieures, à l'exception de ceux tirés du contrat d'où est issue la délégation. En ce qui concerne l’effet entre le déléguant et le délégataire, c’est l’extinction des obligations primitives. Il se diffère suivant qu’il est la délégation novataire ou parfaite et la délégation simple ou imparfaite. Lorsqu'une novation est conclue en même temps que la délégation (délégation parfaite), l'extinction de l'obligation primitive concernée a lieu à l'époque de la formation de la délégation. Cette extinction emporte aussi normalement extinction des sûretés. La question se pose alors de savoir si la survenance de certains événements ne serait pas de nature à remettre en cause l'effet extinctif. En principe, en raison de l'effet extinctif immédiat que produit la novation, le délégataire ne devrait disposer d'aucun recours contre le délégant au cas d'inexécution de l'obligation du délégué. Cependant, lorsque aucune novation n'intervient, c'est l'exécution de la nouvelle obligation qui éteindra la dette et la créance du délégant, totalement ou partiellement. Le double effet extinctif ne se réalise, en effet, qu'à concurrence de la plus faible somme. Mais, lorsqu'une obligation primitive a pour objet un corps certain, il faut présumer qu'elle est éteinte pour le tout. En fin, s’agissant de l’effet entre le déléguant et le délégué, la volonté expresse du déléguant est nécessaire pour l’extincion l’obligation de celui-ci envers celui-là, lorqu’il est conclu la délégation parfaite. Ensuite lorsqu’il est conclu la délégation imparfaite, l’obligation du délégué envers le délégant s’éteint lorsque celle-ci paie l’obligation du délégué envers le délégataire.